Agonie des captages d’eau en Charente-Maritime

Philippe DONNART


Au cours des trente dernières années, 170 points de captage d’eau ont été abandonnés en raison de leur contamination par les nitrates et les pesticides. Malheureusement, malgré cette pollution, ces ouvrages sont restés actifs. Cette situation est source de préoccupation croissante quant à la qualité de l’eau potable.

Pollution de l’eau en Charente-Maritime : une situation qui perdure depuis des décennies

La Charente-Maritime est confrontée depuis plusieurs décennies à l’abandon de ses captages d’eau, qui puisent de l’eau souterraine à différentes profondeurs pour être distribuée sous forme d’eau potable. Cette problématique n’est pas nouvelle et est causée par la contamination des forages par les nitrates et les pesticides, largement utilisés dans l’agriculture et la viticulture. La fermeture de ces captages, comme cela a été le cas récemment dans la région de La Rochelle ou du côté de Saint-Jean-d’Angély en septembre, est devenue une pratique courante. Pour comprendre l’ampleur des dégâts, il suffit de consulter le document du Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM), réalisé en collaboration avec l’Agence régionale de santé (ARS) et la région Nouvelle-Aquitaine.

Selon ce document, 170 captages d’eau ont été abandonnés en Charente-Maritime entre 1984 et 2012. Ce chiffre s’élève à 410 pour l’ancienne région Poitou-Charentes. Les nitrates sont responsables de 50% de la contamination, suivis des pesticides (entre 15 et 25%). Les experts mettaient déjà en garde il y a trente ans contre la dégradation de la qualité de l’eau, qui conduit à l’abandon des captages. Cette situation est liée à une forte pression agricole dans des zones géologiques vulnérables, rendant difficile la protection des captages. Les collectivités continuent donc de fermer régulièrement des ouvrages.

Malgré la mise en place de plans éco-phytosanitaires et de zones de protection autour des nappes phréatiques, la situation ne s’est pas améliorée. Les eaux souterraines restent polluées par des produits qui persistent pendant des décennies. Ainsi, les collectivités sont contraintes de fermer de nombreux captages. Par exemple, Casse-Mortier dans la commune de Clavette a été fermé en 2020 en raison d’une contamination au chlortoluron, un puissant herbicide agricole. De même, le captage de Poursay-Garnaud près de Saint-Jean-d’Angély a été fermé par précaution en raison d’une pollution au chlorothalonil, un fongicide agricole.

Dans certains cas, il est impossible de fermer totalement les captages. C’est le cas des forages de Néré, dans le secteur d’Aulnay, qui sont régulièrement pollués au métolachlore. Il n’existe aucune solution de raccordement à un autre réseau, ce qui oblige les autorités à accorder une dérogation temporaire pour leur exploitation. Les usagers sont ainsi contraints de consommer une eau dégradée, même si les autorités tentent de les rassurer en affirmant qu’il n’y a pas de risque sanitaire.

La situation de la Charente-Maritime en matière de qualité de l’eau potable est préoccupante. Malgré les avertissements des experts et les fermetures régulières de captages, les autorités ne semblent pas prendre la mesure de la gravité de la situation. Les membres de l’association SOS Rivières et Environnement estiment que les politiques ne cherchent pas de solutions et continuent d’autoriser l’utilisation des pesticides. De plus, les contrôles de la qualité de l’eau ne sont pas suffisants pour détecter la présence de certaines molécules, comme les fongicides. Il est donc urgent de prendre des mesures pour protéger la ressource en eau et garantir une eau potable de qualité à tous les habitants de la Charente-Maritime.